ComprendreLa place des énergies renouvelables électriques
Quelle place occupent les énergies renouvelables -en particulier l'éolien- dans le monde, en Europe et en France ? Plus localement, comment expliquer la répartition des éoliennes en Nouvelle-Aquitaine ?
Quelle est la part des énergies renouvelables électriques dans le monde ?
En résumé : A l’échelle mondiale, depuis une quinzaine d’années, la part des énergies renouvelables dans la production électrique croit de manière nette. Cette croissance est principalement portée par l’énergie éolienne et photovoltaïque. A l’inverse, le pétrole et le nucléaire tendent à diminuer, tandis que le charbon stagne et que le gaz augmente.
Les énergies renouvelables (ENR) électriques sont celles dont la source d’énergie est naturelle et se renouvelle rapidement sans qu’il soit nécessaire de puiser dans un stock fini. Cela exclut donc les énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) et le nucléaire qui consomme de l’uranium. Les ENR électriques principales, qui se démarquent aussi par leur faible impact CO2, sont l’hydraulique, l’éolien terrestre et en mer, le photovoltaïque et la biomasse.
Au niveau mondial depuis 1970, le charbon occupe une part stable dans la production électrique (un peu moins de 40 %) et reste la source principale de production d’électricité. Malgré son impact CO2 conséquent, c’est une énergie peu chère dont les centrales sont simples à construire et à gérer. Les productions électriques issues du nucléaire et du pétrole diminuent fortement tandis que la part du gaz est stable. Les énergies renouvelables, principalement hydraulique, éolien et photovoltaïque, augmentent et couvraient environ 26 % du mix énergétique mondial en 2021.
Le développement des énergies renouvelables est donc en nette progression depuis une quinzaine d’année. La majorité des installations hydrauliques a été installée le siècle dernier et les sites potentiels restant pour les infrastructures électriques de grandes puissances se raréfient, en particulier dans les pays développés. C’est donc l’éolien et le photovoltaïque qui font augmenter la puissance du parc ENR mondial depuis le début des années 2000.
En 2021 le cumul de la production éolienne et photovoltaïque franchissait les 10 % du mix électrique mondial en dépassant la production nucléaire.

On peut constater cette évolution sur le graphique suivant qui représente la part de la production électrique par filière.


Quelle est la part des énergies renouvelables électriques en Europe ?
En résumé : L’Europe de distingue, à l’échelle mondiale, comme le continent où le développement des énergies renouvelables est le plus marqué. Alors que l’installation de moyens de production nucléaire, charbon ou gaz diminue, la hausse la plus nette vient du solaire et de l’éolien. Ainsi en 2020, la production renouvelable dépassait celles des énergies fossiles atteignant presque 40 %. L’éolien et le photovoltaïque représentent 20 % soit davantage que le charbon (13 %). La France qui dispose d’un parc nucléaire et hydraulique conséquent est en retard sur le développement de l’éolien et du photovoltaïque malgré son potentiel important.

En Europe, le développement des ENR électriques est plus rapide qu’au niveau mondial, grâce aux politiques européennes et au volontarisme de certains pays (Portugal, pays Scandinaves, Allemagne, Royaume-Uni). Les différences entre Etats sont particulièrement marquées par l’influence du potentiel propre à chaque pays pour les différentes sources d’énergie, mais également en fonction de la politique, des industries et de l’historique.

Le développement des énergies renouvelables est porté par l’éolien et le photovoltaïque alors que la bioénergie est stable et l’hydraulique varie chaque année selon l’hygrométrie.
En 2020, les énergies renouvelables représentaient 38 % de la production d’électricité en Europe. L’évolution de la production de 2019 à 2020 démontre une baisse des énergies fossiles et nucléaire au profit des énergies renouvelables.

Depuis 2016, les nouvelles installations de moyens électriques sont pour plus de 80 % de la puissance des énergies renouvelables. L’Europe installe donc moins de 20 % de nouveau moyen de production fossile (principalement du gaz, le nucléaire étant absent).
« Malgré ces progressions, la part des énergies renouvelables reste, en 2018, en dessous de la trajectoire fixée par le plan national d’action en faveur des énergies renouvelables pour l’atteinte en 2020 des objectifs fixés par la directive européenne. » Commissariat général au développement durable – Datalab Les énergies renouvelables en France en 2018 – 09/2019

Quelle dynamique pour l’éolien en Europe ?
En résumé : En 2020, l’énergie éolienne couvrait à elle seule 16 % de la consommation électrique dans l’Union européenne. Cette part reste très variable entre les pays avec 48 % au Danemark, 38 % en Irlande et 9 % en France. L’éolien se développe rapidement, notamment aux Pays-Bas, en Allemagne et en Norvège, tous les trois sur le podium UE en termes de nouvelle installation. La France, 5e peut encore faire mieux, d’autant qu’elle dispose du second potentiel éolien en Europe et que la puissance installée y est très faible, comparée à la superficie du pays.
Le taux de couverture de la production électrique par l’éolien est très variable selon les pays européens et il était en moyenne de 16 % en 2020. Le graphique ci-dessous montre que peu de pays européens n’ont aucune éolienne sur leur territoire alors que le Danemark couvre la moitié de ses besoins électriques grâce à l’éolien. Seuls les pays de faible superficie ou avec un gisement de vent limité sont sous la barre des 10 %, ce qui fait de la France une exception.
« Avec 458 TWh de production, l’énergie éolienne couvre 16 % des besoins d’électricité européenne en 2020. » Source : Wind Europe – Wind energy in Europe in 2020 – p.21
La part de la capacité installée de l’éolien augmentent régulièrement en Europe avec l’arrivée de l’éolien en mer (offshore) depuis 2010.

En 2020, le pays avec la puissance éolienne installée (sur terre et en mer) la plus importante est l’Allemagne avec 63 GW. La France est quatrième dans ce classement, avec 18 GW.

La France dispose du deuxième potentiel éolien d’Europe après le Royaume-Uni. Elle ne comptait pourtant, en 2020, aucune éolienne en mer (hors prototype flottant) malgré son fort potentiel maritime. Le premier parc éolien offshore a été construit à l’été 2022, avant d’être raccordé au réseau la même année. En croisant les données de 14 pays européens, on constate que la France n’est pas un pays dense en éolien en termes de puissance installée ramenée à la superficie ou au nombre d’habitants.


Quelle dynamique pour l’éolien en France ?
En résumé : En France, l’énergie éolienne couvrait, en 2020, 8,8 % de la consommation d’électricité du pays. Cette part est en progression constante depuis le début des années 2000 et représente une source incontournable pour continuer à développer les énergies renouvelables sur le territoire. En raison de nombreuses contraintes, la production d’électricité grâce à l’éolien n’est pas homogène sur le territoire : les Hauts-de-France et la région Grand Est sont particulièrement en avance.
L’énergie éolienne représente une part croissante dans le mix énergétique électrique français. L’essor de cette énergie s’est confirmé à partir de 2005, première année où la production est devenue significative (supérieure à un térawattheure, TWh). En 2020, l’éolien représentait 12,9 % de la puissance installée du parc français et couvrait 8,8 % de la consommation électrique nationale. Cette différence s’explique par son facteur de charge plus faible que la moyenne des autres moyens de production électrique. (Voir facteur de charge)
« L’énergie éolienne produite est en hausse, et devient la 3ème source de production devant le gaz » Source : RTE – Bilan électrique 2020
En 2020 la production de l’éolien s’élevait à 40 TWh, en progression constante avec un parc installé de 17 600 MW.
« Mi-2020, les capacités éoliennes sont réparties sur l’ensemble du territoire français, avec plus de 1 450 parcs comptant 8 436 éoliennes.» Source : Capgemini invent pour FEE – Observatoire de l’éolien 2020 – 09/2020 p.17

La répartition de l’éolien sur le territoire français n’est pas homogène et dépend principalement de la ressource de vent disponible par région. Certaines contraintes (militaires, techniques …) qui couvrent des superficies importantes expliquent que de larges zones ne sont pas équipées de parcs éoliens malgré un bon gisement de vent.
« Si l’hydraulique constitue aujourd’hui la principale source d’énergie renouvelable pour l’électricité en France (environ 12 % de la production totale d’électricité), elle présente peu de possibilités d’accroissement de production. L’énergie éolienne offre, pour le système électrique français, un potentiel technique important et encore largement sous-exploité. » Source : Ademe – Les avis de l’Ademe l’énergie éolienne – 04/2016
L’éolien est la troisième source d’électricité en France, la deuxième pour les énergies renouvelables. Elle devrait dépasser l’hydraulique dans les prochains années faute d’installation supplémentaire possible pour celle-ci.

L’Allemagne ajoute-t-elle du charbon pour compenser son éolien ?
En résumé : La France et l’Allemagne sont souvent utilisées pour des comparaisons, qui peuvent s’avérer hasardeuses tant les trajectoires historiques et les ressources disponibles y sont différentes. Avec 10 ans de recul, la décision prise par l’Allemagne de sortir du nucléaire, après la catastrophe de Fukushima en 2011, s’est principalement traduite par un essor des énergies renouvelable.
Le charbon a certes été utilisé dans un premier temps (jusqu’en 2014) mais depuis, ce sont les énergies renouvelables (et le gaz dans une moindre mesure) qui ont remplacé le nucléaire et le charbon. Les comparaisons de la production des différentes filières allemandes, entre 2009 et 2018, sont explicites : le charbon est passé de 254 à 229 TWh ; le nucléaire de 135 à 76 TWh. Dans le même temps, les énergies renouvelables sont passées de 96 à 226 TWh (le gaz a stagné, de 81 à 83 TWh).
Lors des débats sur l’énergie et sur la production d’électricité en particulier, le cas de l’Allemagne est souvent pris en exemple à suivre ou à éviter. Or les mix énergétiques français et allemand sont difficilement comparables et sortis de leur contexte, les parallèles entre les deux sont parfois incohérents.
Historiquement, la France a très majoritairement misé sur la production électrique d’origine hydraulique puis nucléaire alors que l’Allemagne, surtout à l’est du territoire, a beaucoup de mines de charbon et donc une production électrique importante avec cette source.
Lors de la décision de l’Allemagne de sortir du nucléaire, les autres moyens de production électrique ont dû prendre le relais temporairement en attendant l’essor des renouvelables. En 2013, le prix du charbon était particulièrement bas. C’est donc le charbon, déjà très majoritaire dans le mix électrique, qui a été privilégié au détriment du gaz pour des raison économiques. Pendant cette période de transition, la puissance installée des centrales charbon a peu variée mais les installations ont été davantage utilisées. C’est le facteur de charge (Voir facteur de charge) de cette énergie qui a augmenté temporairement.
A partir de 2014, ce sont bien les énergies renouvelables qui ont compensé la baisse du nucléaire en Allemagne et qui ont également contribués, avec le gaz, à la baisse de la production à base de charbon.
Ces courbes présentent l’évolution de la production d’électricité en Allemagne par secteur sur la période 1990 à 2020 :

En Allemagne, on remarque que depuis 2007 la production électrique à partir de charbon a été divisée par 2 celle du nucléaire par 2 également tandis que l’éolien a été multiplié par plus de 3 et le photovoltaïque par 16. L’assertion selon laquelle l’éolien en Allemagne nécessite de relancer le charbon s’avère donc fausse et c’est bien le remplacement du charbon et du nucléaire par l’éolien et le photovoltaïque que l’on constate en Allemagne.
Le Danemark, pays européen dont le mix électrique comporte le plus d’éolien, présente un autre exemple. On constate que la production d’électricité ne comporte pas de nucléaire et que le charbon est en baisse constante ainsi que le gaz alors que l’éolien représente plus de 50 % de la production d’électricité.


Quelle est la dynamique de l’éolien en Nouvelle-Aquitaine ?
En résumé : La Nouvelle-Aquitaine est la plus grande région de France. Pour autant, elle n’est que la 4e en termes de puissance éolienne raccordée au réseau, malgré un gisement de vent intéressant. Ces chiffres la placent en retard par rapport aux autres régions, mais aussi par rapport aux objectifs fixés par le Conseil régional (dans un document nommé Sraddet). La Nouvelle-Aquitaine étant très grande, on comprend facilement que les conditions varient largement rendant favorable ou non le développement des énergies renouvelables selon leur type. Le relief, les zones naturelles à protéger, les villes, les zones militaires ou les gisements de vents sont autant de variables qui expliquent qu’actuellement, le nord de la région (les Deux-Sèvres et la Vienne notamment) est plus favorable au développement de l’éolien. De la même manière que la Corrèze (avec ses cours d’eau) ou les Landes (grâce à l’ensoleillement) sont plus propices à la production hydraulique ou photovoltaïque.
Etat des lieux en Région et objectifs
La Nouvelle-Aquitaine est la plus grande région de France par sa superficie, elle a donc un rôle primordial à jouer dans le déploiement des énergies renouvelables. Par ailleurs, sa densité de population est plutôt faible. Le territoire présente donc de nombreux atouts pour l’éolien mais également pour le photovoltaïque et l’hydraulique. Toutefois, les ressources ne sont pas réparties de façon homogène entre les départements.
Au total, mi-2022, la Nouvelle-Aquitaine comptait 1 441 MW d’éolien en exploitation, pour 659 éoliennes, soit 7,2 % de la puissance nationale pour un territoire couvrant 15,4 % de la France métropolitaine (Source : Ministère de la transition énergétique – statinfo – tableau de bord éolien 2e trimestre 2022)
Les Schéma Régionaux de l’Eolien (SRE) sont des documents caducs mais ils peuvent être utilisés pour comparer les ambitions des anciennes régions à l’échéance 2020 avec les chiffres actuels. On constate que l’objectif agrégé des 3 ex-régions pour 2019, n’est rempli qu’à hauteur de 51 % (1 441 MW sur un cumul de 2 790 MW). La Nouvelle-Aquitaine accuse donc un retard considérable sur ses propres objectifs.

A présent, c’est le Sraddet (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires), validé le 27 mars 2020 par la Région, qui fixe les objectifs pour l’éolien. Il est prévu 4 500 MW d’éolien terrestre pour 2030 et 7 600 MW pour 2050. Cela correspond donc à un rythme d’installation moyen entre 2020 et 2030 de 335 MW par an, soit une petite centaine d’éoliennes (Source des chiffres : Région Nouvelle-Aquitaine – Rapport d’objectifs du SRADDET – 12/2019 (p.150)).
La Nouvelle-Aquitaine est donc historiquement en retard sur le développement de l’éolien, comparé à d’autres régions et en considérant son potentiel confirmé par les objectifs du Sraddet. En tenant compte de l’augmentation de puissance des éoliennes actuelles et du repowering (remplacer tout ou partie d’anciennes infrastructures énergétiques par de nouvelles), il faudrait ajouter 3 GW soit environ 750 éoliennes pour atteindre cet objectif (soit une multiplication par plus de 2 du nombre de mâts).
Contraintes techniques et gisement éolien
La répartition inéquitable de l’éolien sur le territoire s’explique par les contraintes techniques et le gisement de vent régional hétérogène. C’est une question éminemment technique et non politique, comme on peut souvent l’entendre. Le Sraddet prévoit le développement éolien en suivant une meilleure répartition entre les départements mais qui sera limité par le pragmatisme de ces enjeux.
Pour comprendre la répartition des éoliennes sur le territoire, on peut étudier les différentes contraintes par catégorie puis les superposer. Ci-dessous, une série de cartes propose une approche volontairement simplifiée pour illustrer les contraintes larges qu’il convient d’éviter.
- Environnement : Les zones protégées pour des raisons écologiques comme les sites Natura 2000 ou les Znieff 1. Sites et patrimoine : Les sites inscrits et classés ainsi que les sites Unesco et leur périphérie.
- Contraintes techniques type radars de l’aviation civils et militaires ou météorologique. Zones de protection aéronautique civils puis zones et couloirs d’entrainement militaires.
- Grandes zones urbanisées qu’il faut compléter par l’ensemble des habitations diffuses sur le territoire.
- La moyenne annuelle de vitesse du vent à 100 m de hauteur. Un gisement de vent annuel à 8,5 m/s (vert foncé) produit deux fois plus d’énergie qu’un gisement à 6,75 m/s (jaune orangé). Pour rappel l’énergie du vent est fonction du cube de sa vitesse (Voir taille et puissance). Le développement se fait donc en priorité dans les zones avec un meilleur potentiel énergétique.


Répartition de l’éolien et des énergies renouvelables par département
La superposition des contraintes rédhibitoires et du gisement de vent explique facilement la carte de répartition de éoliennes sur le territoire.

L’objectif ambitieux du Sraddet pose la question de la répartition des installations sur le territoire. Les chiffres par ex-région révèlent que 87 % de la puissance éolienne est installée en Poitou-Charentes pour 13 % en Limousin et rien en Aquitaine.
Considérant les contraintes applicables à l’éolien et le gisement de vent, le développement continuera d’être favorisé dans certains départements. D’autres départements pourraient prendre le relais dans une moindre mesure, grâce à l’amélioration de la technologie des éoliennes capables de capter des vents plus faibles. Toutefois, pour libérer le potentiel du territoire en Nouvelle-Aquitaine, il faudrait que certaines contraintes, en particulier militaires, soient levées.
L’éolien n’est pas une exception et on constate également un déséquilibre important entre départements pour le photovoltaïque et l’hydraulique. Cette carte représente la répartition de chacune de ces 3 énergies renouvelables électriques. Les 4 départements avec les puissances installées les plus importantes sont la Corrèze, la Gironde, les Landes et les Pyrénées-Atlantiques.

Chaque département profite donc de son potentiel énergétique en déployant la ou les énergies renouvelables adaptées. En Limousin et Pyrénées-Atlantiques, c’est l’hydraulique qui domine. En Aquitaine, c’est principalement le photovoltaïque complété par de l’hydraulique vers les Pyrénées. En Poitou-Charentes l’éolien domine, complété par du photovoltaïque.
Il est donc illusoire d’attendre une répartition homogène de l’éolien sur le territoire néo-aquitain tout comme il n’est pas imaginé que l’hydraulique soit réparti équitablement entre département.